Droit de l’Homme en Guinée : » 2023 a été une année sombre » Frédéric Foromo Loua
L’année 2023 a été une année sombre pour les ONG de défense des droits humains, dans leur combat pour le respect des droits de l’homme en Guinée. Les restrictions et les violations par le gouvernement ont contribué à faire reculer l’État de droit en Guinée
Conakry Infos a rencontré ce mercredi 3 janvier Maître Frédéric Foromo Loua, directeur exécutif de l’ONG Mêmes Droits pour Tous (MDT) afin d’avoir son regard dans ce domaine. En dehors du procès du massacre survenu en 2009 au stade du 28 septembre, point qu’il estime positif, il relève plutôt un recul démocratique marqué par la restriction grave des libertés d’expression et de manifestations.
« En 2023, le respect des droits de l’homme a été problématique en Guinée. La situation a été très difficile et particulièrement éprouvante pour l’ensemble des Guinéens. Donc, on avait pensé que 2023 allait être meilleur que 2022, mais hélas, tel n’a pas été le cas. Parce que 2023 a vu la restriction de certaines libertés fondamentales, notamment la liberté de manifestation, la liberté d’opinion, la liberté d’aller et de venir de certains de nos concitoyens. Nous avons assisté au rétrécissement de l’espace civil et politique, ce qui a abouti à la suspension de certains médias en ligne qui ne pouvaient plus être lus en Guinée. Il y a eu également le brouillage de certaines ondes de certaines radios, et cette situation a conduit au retrait de ces médias sur le bouquet Canal. Aussi on n’a pas permis aux Guinéens de manifester, de marquer leur désaccord par rapport à la gestion de la chose publique. » a-t-il expliqué.
Ce défenseur des droits de l’Homme estime que dans le domaine judiciaire, plusieurs manquements ont été constatés au cours de cette année qui s’achève.
« Il y a eu des cas de tuerie en Guinée à l’occasion des manifestations, des répressions assez dures lorsque les Guinéens ont tenté de démontrer qu’ils n’étaient pas d’accord avec la gestion des affaires publiques. Nous avons assisté à l’organisation de beaucoup de procès, souvent dans des conditions qui ne respectent pas le code de procédure pénal. Il y a des détenus de l’ancien régime qui sont encore à ce jour en situation de détention en violation des délais prescrits en termes de détention provisoire. Il y a beaucoup d’hommes politiques qui sont en détention et qui n’ont pas été jugés dans les délais requis et qui restent malheureusement en prison. Il y a aussi la situation des détenus de façon générale. Donc, il y a assez de personnes en situation de détention illégale et qui n’ont pas accès à la justice. Il y a le fait que les avocats ne sont pas souvent disponibles et lorsque la justice ou les tribunaux veulent organiser les procès pénaux pour que les gens qui font l’objet de poursuite soient situés sur leur sort », a-t-il fait comprendre.
Parlant de la transition Maître Frédéric Foromo Loua estime que les autorités guinéennes font une gestion opaque de la transition. Chose qu’il juge anormale.
« L’autre grand problème est celui lié à la gestion de la transition. Nous avons l’impression que c’est une gestion solitaire, non inclusive et qui inquiète véritablement. Nous avons pensé que des jalons allaient être posés, mais de façon notable pour marquer le programme du déroulement de la transition. Mais au jour d’aujourd’hui, bon nombre de Guinéens sont restés sur leur faim, il n’y a pas de grille de lecture, il n’y a pas de lisibilité dans la gestion de la transition. Ce qui fait qu’elle s’étale dans le temps et cela inquiète alors nous avons intérêt à revenir très rapidement à l’ordre constitutionnel qui a été rompu en septembre 2021. Donc, il était normal que tout cela soit fait de telle sorte qu’on puisse avoir une gestion concertée, inclusive et collégiale de la transition parce que de toute façon, nous sommes tous guinéens et la Guinée appartient à ses fils. », a déploré le directeur exécutif du MDT.
Enfin, il a déploré le fait que certains dossiers de condamnation que les ONG ont portés contre la Guinée devant les tribunaux internationaux, notamment devant la Cour de justice de la CEDEAO, n’ont pas été respectés ni exécutés par les autorités guinéennes.
La suite de l’interview à suivre bientôt…
Mamadou Samba Barry
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