[dropcap]M[/dropcap]ohamed Dionne, un ex-fonctionnaire international réputé proche du président Macky Sall, a été nommé dimanche Premier ministre du Sénégal en remplacement de Mme Aminata Touré, limogée après dix mois à la tête du gouvernement et une défaite à Dakar à des élections locales.
Agé de 54 ans, – son nom complet à l’état civil – est un ancien fonctionnaire à l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi).
Il était depuis mars ministre conseiller à la présidence chargé du suivi de l’exécution d’un plan de développement économique et social, visant à faire du pays une économie émergente à l’horizon 2035, dit «Plan Sénégal émergent (PSE)». En février à Paris, Dakar a obtenu des engagements financiers internationaux de 5,6 milliards d’euros pour la mise en oeuvre du PSE.
«Le chef de l’Etat m’a donné (…) une feuille de route qui peut se décliner en deux mots: au travail», a déclaré M. Dionne à la presse à sa sortie d’audience avec le chef de l’Etat.
«Au travail pour que sa vision d’un Sénégal émergent dans la solidarité et l’Etat de droit soit une réalité», pour «le développement d’un secteur aussi important que l’agriculture», «pour que la paix règne dans ce pays, dans la sécurité et l’Etat de droit», entre autres chantiers, a-t-il ajouté.
Selon la presse locale, Mohamed Dionne est né le 22 septembre 1959 à Gossas (environ 200 km au sud-est de Dakar), dans la région de Fatick.
Ingénieur spécialisé en économie appliquée, il a notamment travaillé dans une banque ouest-africaine et à l’ambassade du Sénégal en France. Avant sa nomination en mars comme ministre auprès du président, il était fonctionnaire à l’Onudi.
Il est réputé travailleur, discret et proche du président Macky Sall dont il a été directeur de cabinet lorsqu’il était Premier ministre puis président de l’Assemblée nationale de 2004 à 2008 durant le régime d’Abdoulaye Wade.
M. Wade, qui a dirigé le Sénégal douze ans (2000-2012), a été battu par Macky Sall à la présidentielle en mars 2012.
– Ni vainqueur, ni perdant –
Mohamed Dionne est le troisième Premier ministre du régime de Macky Sall après Abdoul Mbaye, ex-banquier qui a été chef du gouvernement 17 mois, et Mme Aminata Touré, ex-ministre de la Justice, qui a occupé ce poste dix mois.
Mme Touré est une responsable de l’Alliance pour la République (APR), le parti du chef de l’Etat créé fin 2008. Elle a été limogée le 4 juillet, moins d’une semaine après les élections municipales et départementales du 29 juin.
A Grand-Yoff, commune de la capitale sénégalaise, la liste dirigée par Mme Touré a été devancée par une coalition dissidente emmenée par le maire sortant de Dakar Khalifa Sall.
Les résultats complets officiels des élections locales n’étaient pas connus jusqu’à dimanche soir. D’après des chiffres rapportés par de nombreux médias locaux, l’APR a perdu de grandes villes comme Dakar et plusieurs ministres ont été battus dans leurs circonscriptions.
Toutefois, la coalition au pouvoir, appelée «Benno Bokk Yaakaar» (BBY, «Ensemble pour le même espoir» en langue wolof), dont les responsables ont peiné à s’entendre sur des listes communes dans de nombreuses localités, aurait gagné dans plus de 70% des circonscriptions électorales du pays. Ce qui en fait une victoire en demi-teinte pour la majorité présidentielle.
Avec le scrutin du 29 juin, l’APR espérait renforcer ses bases.
L’ex-président Abdoulaye Wade, rentré fin avril au Sénégal après près de deux ans passés en France, a sillonné le pays pour soutenir sa formation, le Parti démocratique sénégalais (PDS), qui contrôlait une majorité de collectivités locales après les locales de 2009. Mais son renfort n’a pas permis au PDS de distancer ses adversaires.
«Personne n’a gagné, personne n’a vraiment perdu» à l’issue de ces locales, a résumé Abdoulaye Bamba Diallo, éditorialiste et politologue sénégalais pour qui les élus «viennent de tous les camps et de tous les bords. Tous les camps politiques devraient être satisfaits de n’avoir pas subi une bérézina électorale».
Depuis l’arrivée au pouvoir de Macky Sall, les autorités ont pris des mesures censées atténuer les difficultés des ménages, mais de nombreux Sénégalais estiment que peu de choses ont changé dans leur vie quotidienne.
AFP