Le 26 mars 1984, le président guinéen Ahmed Sékou Touré décédait dans un hôpital de Cleveland, aux États-Unis. Quarante ans plus tard, le débat qui entoure sa mémoire déchire toujours les familles des victimes de son régime et les héritiers de ses idées sur le panafricanisme et la dignité africaine.
« Il n’y a pas de dignité sans liberté : nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage », le peuple guinéen sera gâté : il aura la pauvreté mais également la répression, la dictature.
Cette réponse cinglante à De Gaulle, en visite à Conakry le 25 août 1958, pour convaincre, en vain, la Guinée d’accepter la Communauté Franco-Africaine, signera le début de la mission « déstabilisation Guinée » par la machine Françafrique. Sékou Touré a pourtant remis son discours à Jacques Foccart quelques jours plus tôt.
Mais « Monsieur Afrique » ne l’a pas transmis à de Gaulle. Le SDECE (Service de Contre-Espionnage Extérieur) n’a pas ménagé ses efforts pour le destituer du pouvoir. La première tentative de déstabilisation vise l’économie guinéenne c’est « l’opération Persil ». Les services secrets français ont fabriqué des
faux francs guinéens. L’économie du pays, déjà malade, traverse une grosse période de crise ce qui oblige la dévaluation du franc guinéen. Pour Foccart, Sékou
Touré est l’ennemi public numéro un. Outre son charisme et le fait qu’il pourrait influencer les pays voisins, son rapprochement avec l’URSS ne plaît
pas du tout au chef de la cellule Afrique de l’Elysée. À la suite des nombreux coups d’Etats dont il est la cible, le « grand Syli » a fait preuve d’une paranoïa incontrôlable, ce qui provoque l’arrestation de nombreux opposants politiques présumés. Le symbole de cette répression est le Camp Boiro où près
de 50 000 personnes périrent…
Malgré tout, Sékou Touré était un anti-impérialiste et panafricaniste, ses seuls alliés de la région sont le Malien Modibo Keïta et le ghanéen Kwame Nkrumah. Ce n’était pas du goût de la France avec qui il rompt les relations diplomatiques de 1965 jusqu’à la visite officielle de Giscard d’Estaing à Conakry en 1978. Sékou Touré fera, lui, sa visite « réconciliatrice » en France en 1982.
Deux ans plus tard, le 26 mars 1984 l’enfant de Faranah (son village natale) décède brutalement dans un hôpital de Cleveland. Ironie de l’histoire, malgré les innombrables tentatives de putsch ou d’élimination, Sékou Toure est mort de mort naturelle !
Avec Survie.org