[dropcap]U[/dropcap]ne semaine après les déclarations du Général Sékouba Konaté – qui affirme avoir déposé auprès de la Cour pénale internationale (CPI) une liste de noms de personnes impliquées, selon lui, dans le massacre du 28 septembre 2009, le nouveau ministre guinéen de la Justice, Cheick Sako, a accepté de répondre aux questions de « Jeune Afrique ».
Depuis sa nomination au poste de ministre de la Justice, fin janvier, Me Cheik Sako ne s’est pas beaucoup exprimé dans les médias. A 60 ans, cet avocat du barreau de Montpellier, en France, – où il dirige toujours son cabinet – avoue ne pas vraiment être un homme de communication et préférer s’atteler à sa mission, car dit-il : « sur le plan judiciaire tout est à construire en Guinée ».
Près d’une semaine après la sortie médiatique du Général Sékouba Konaté – qui affirme avoir déposé auprès de la Cour pénale internationale (CPI) une liste de noms de personnes impliquées, selon lui, dans le massacre du 28 septembre 2009 – et quelques jours après l’énième appel à accélérer les procédures judiciaires dans le pays par la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), le Garde des Sceaux guinéen a accepté de répondre aux questions de Jeune Afrique sur l’avancement dudit dossier.
Jeune Afrique : Il y a quelques jours, le général Sékouba Konaté a affirmé avoir transmis à la CPI les noms des « véritables commanditaires » du massacre du 28 septembre 2009. Que pensez-vous de sa démarche ?
Me Cheick Sako : C’est tant mieux. S’il a effectivement déposé une liste de noms à la CPI, je pense que le greffe et le procureur de la Cour vont la transmettre aux autorités judiciaires guinéennes, car nous collaborons évidemment avec la Cour sur ce dossier. Le pôle des trois juges d’instruction qui travaille actuellement sur cette affaire en Guinée fera alors son travail. Si cette liste existe, les personnes qui y sont mentionnées seront alors convoquées et auditionnées. Je peux vous le garantir.
Tout de même, n’est-ce pas un peu étrange que le général Konaté, ex-Président de la transition guinéenne, soit allé directement voir la CPI, sans passer par les autorités judiciaires du pays ?
Je suis en effet quelque peu surpris… Mais je n’en dirais pas plus, car ça serait entrer dans des polémiques inutiles.
Étiez-vous au courant de l’existence de cette liste ou de son dépôt auprès de la CPI ?
Pas du tout. Ce qu’il faut rappeler c’est qu’il ne s’agit là que de la parole d’un homme. Les juges qui travaillent sur cette affaire connaissent très bien le dossier et savent qui est impliqué de près ou de loin dans ces évènements. Plus de 400 victimes ont déjà été auditionnées. Parmi les accusés, beaucoup ont été entendu et huit, dont des haut-gradés, ont été inculpés.
Huit inculpations, alors que plusieurs dizaines de membres des forces de l’ordre seraient impliqués, n’est pas un peu léger ?
Ces inculpations, ce n’est pas rien et surtout, ce n’était pas envisageable il y a quelques années dans ce pays. Je rappelle qu’en tant que Garde des Sceaux, je ne connais évidemment pas le contenu du dossier. Je veille à ce que les juges aient les moyens de respecter la procédure et fais en sorte que les magistrats puissent travailler dans la sérénité, qu’ils puissent instruire à charge et à décharge. Mais je vous garantis qu’il y a aura une justice nationale pour ces faits. La Guinée ne peut pas y échapper.
Pourtant les ONG se plaignent régulièrement des lenteurs de la justice guinéenne sur cette affaire…
Je suis avocat de formation et j’ai pratiqué le pénal en France pendant 25 ans. Je peux vous dire que les lenteurs de la justice on les retrouve partout. Comparer les délais de procédures guinéens avec ceux qui existent dans la plupart des pays du nord, cela n’a d’ailleurs pas beaucoup de sens. Le plus important c’est que les choses avancent, même lentement.
Propos recueillis par Haby Niakate (JA)