Mamadou Diouldé Sow: « La Guinée promue au 14e rang des pays prioritaires en matière de développement»

[dropcap]E[/dropcap]xpert senior en passation des marchés, le député uninominal de Pita, Mamadou Diouldé Sow préside en même temps le Groupe d’amitié Guinée-Belgique. C’est à ce titre d’ailleurs qu’il vient d’effectuer une mission de travail dans des pays du Benelux où il a noué de fructueux contacts avec les partenaires ainsi qu’avec les étudiants guinéens en Belgique. Interview.

Conakryinfos.com : Vous êtes le président du groupe d’amitié Guinée-Belgique. C’est quoi cette structure ?

Mamadou Diouldé Sow : Alors, dans le fonctionnement normal de l’Assemblée nationale, il est prévu, sur le plan international, qu’au niveau de chaque groupe parlementaire, qu’il y ait des groupes d’amitié. Qu’un groupe de 12 députés se mette ensemble et essaie de travailler dans le cadre de la valorisation, de l’intensification des relations d’amitié entre la Guinée et d’autres pays du monde. Et cela est valable dans les institutions qui ont elles aussi des groupes d’amitié. Donc, c’est une pratique traditionnelle des institutions parlementaires. Le groupe d’amitié que j’ai l’honneur de présider est celui qui existe entre la Guinée et la Belgique, entre la Guinée et les Pays-Bas, et entre la Guinée et le Luxembourg.

Justement, vous rentrez d’une tournée qui s’est étendue sur la Hollande et la Belgique. De quoi il a été question ?

C’était ma première mission de prise de contact en tant que président du groupe d’amitié des pays du Benelux. Donc, j’ai commencé par la Belgique. Et là, j’ai eu beaucoup de rencontres. En dehors des institutions de la Wallonie et de la Flandre, j’ai rencontré l’ambassadeur de Guinée. J’ai rencontré le conseiller spécial du ministre De Croo de la Coopération internationale chargé de la Communication, avec lequel j’ai beaucoup discuté de questions intéressantes sur les relations entre la Guinée et la Belgique. Parce que c’est un nouveau mariage qui commence. La Guinée vient d’être promue au 14e rang des prioritaires en matière de développement. La Guinée n’était pas éligible. Mais, elle vient d’intégrer. Donc, j’étais venu, du côté du Parlement, jouer le rôle de moteur pour galvaniser ces relations qui venaient de commencer. Et j’ai été heureux d’avoir été reçu par un des principaux conseillers du ministre, qui a personnellement demandé à ce qu’on me reçoive. Parce que je l’avais déjà vu en Guinée lors de son passage la dernière fois. Il a demandé qu’on m’écoute et qu’on m’accorde tout le temps pour exposer ma vision sur ce que je pense être de la nouvelle dynamique de coopération entre la Belgique et la Guinée. Parce que, comme vous le savez, la représentation nationale a son mot à dire. En matière de coopération, ce sont des Etats qui coopèrent, mais au nom des populations des deux pays. Et comme nous sommes la représentation nationale, nous entendons nous impliquer pour accompagner les initiatives et nous assurer que l’Etat, qui prend des engagements au nom des populations guinéennes, que ceux-ci vont aux ayant-droits. Et là, nous comptons jouer pleinement notre rôle. C’est pour cela que j’étais allé les voir. Et j’étais très content de savoir qu’il y a un groupe d’amitié et qui est décidé à jouer son rôle pour accompagner cette nouvelle coopération entre la Guinée et la Belgique.

De quoi avez-vous parlé principalement ?

Principalement, nous avons parlé d’un projet qui moi, me tient à cœur. C’est imaginer un projet de retour des Guinéens vivant en Europe vers la Guinée, notamment en Belgique. Aujourd’hui, vous avez beaucoup de ressortissants guinéens en Belgique : plus de 10.000 guinéens. Parmi ces gens, il y en a qui sont intégrés. Il y en a qui ne le sont pas. Il y en a d’autres qui sont en phase d’intégration. Alors, quand j’ai approché toutes les associations de ressortissants guinéens en Belgique, je me suis rendu compte de l’ampleur des problèmes qu’il y a. Notamment au niveau des jeunes qui prennent la mer. Ceux qui ne meurent pas, qui arrivent et qui commencent les difficultés de la vie. Sans papiers, sans rien. On ne peut pas rester les bras croisés. Il faut aider ces gens. Et les pays d’asile sont demandeurs d’une réflexion comme ça, nouvelle, qui va faire qu’on va monter un projet, sur financement de l’Union européenne et du royaume de Belgique, mettre un guichet où des gens qui veulent revenir définitivement ou temporairement, soumettent des projets d’activités génératrices de revenu et qu’ils viennent s’installer avec de nouvelles visions, de nouvelles mentalités. Parce qu’ils auront épousé un plus au niveau des pays où ils vivent, notamment la Belgique. Donc, les gens ont accédé à cette idée et ont estimé que ce serait une première. C’est une idée sur laquelle nous allons travailler. Et ils sont prêts, dès 2017, à mettre un financement comme ça dans la cagnotte qu’ils vont allouer à la Guinée. Pour ce faire, j’ai rencontré plusieurs associations de ressortissants. Parce que pour moi, il faut d’abord travailler avec les associations de ressortissants. Puisque là les gens ont confiance. C’est leur association qu’ils ont mise en place. Là, ils s’ouvrent. Ils disent ce qu’ils veulent. Donc, on va partir des associations pour remonter les problèmes, mettre un noyau technique qui va étudier les besoins en projets de chaque guinéen ou groupe de guinéens qui voudrait monter un projet, être accompagné et revenir au pays. Et en Guinée, on va monter le siège du projet ici, qui va recevoir les gens, les aider à leur réinsertion, les aider dans le cadre de l’obtention des papiers administratifs et la facilitation de leur insertion. On peut faire un bureau à Conakry et des bureaux au niveau de chaque région naturelle, pour aller être plus près, pour suivre l’itinéraire technique et voir si effectivement les gens font ce pourquoi ils se sont engagés et ce pourquoi ils ont reçu l’argent. Vous avez dit tantôt que la Guinée vient d’être promue au 14e rang des pays prioritaires en matière de développement.

Qu’est-ce qui a milité en cette faveur ?

Le pays revient de loin. On est supposé avoir eu des élections libres et démocratiques. Donc, ils pensent que la Guinée est un pays à accompagner, notamment après Ebola. C’est un pays fragile qu’il faut accompagner pour vraiment asseoir la démocratie. Donc, tout cela a milité. Et aussi, le pays a un potentiel. Et la Belgique a besoin d’élargir sa base de coopération. Parce que la Belgique était en Guinée. Ils sont partis pour plusieurs raisons. Maintenant, ils veulent revenir. Et c’est tout cela qui a milité en faveur du retour de la Guinée. Et je vais le noter, nous avons un ambassadeur dynamique. Nous avons un excellent ambassadeur en la personne de Son Excellence Sylla, qui a été de beaucoup dans cette réussite. Et c’est pour cela que nous avons 65 opérateurs économiques belges qui viennent. Et en octobre, nous organisons la venue d’une centaine d’autres opérateurs qui vont voir quelles sont les possibilités de travail entre les opérateurs économiques guinéens et belges. Et d’autres iront vers les ministères sectoriels où ils sont intéressés à financer ou à collaborer.

Autres profits que la Guinée pourrait éventuellement tirer de cette promotion ?

En tant que pays prioritaire, les ressources au développement, nous sommes éligibles. Donc, nous pouvons, avec la SRP que nous mettons en place, notre stratégie de réduction de la pauvreté pour les années à venir, on peut avoir des priorités éligibles et qu’on peut faire financer par la Belgique. C’est ça l’avantage. Par exemple, sur le plan culturel, je suis allé rencontrer les jeunes étudiants guinéens. Vous savez actuellement, la Guinée n’envoie pas officiellement d’étudiants. C’est maintenant que ça va commencer peut-être. Mais il y a des jeunes guinéens, qui se sont arrangés, d’une façon ou d’une autre, par leurs parents ou par leur courage à être inscrits dans des universités belges. Ils sont dans d’énormes difficultés. Donc, quand ils ont appris que je suis là, ils ont demandé à me rencontrer. Et je les ai rencontrés à l’Université libre de Belgique (ULB) où ils ont commencé à monter une association des jeunes étudiants guinéens en Belgique. Alors, je suis venu les écouter. Ils ont beaucoup de difficultés, contrairement à certains pays qui ont déjà des accords, où il y a des facilités accordées aux étudiants de ces pays. Donc, j’ai pensé que c’était bien de les écouter, les encourager et de leur demander de se mettre ensemble. La recommandation majeure que j’ai eue après les avoir écoutés, c’est de leur demander d’élargir et qu’ils aient tous les guinéens dans cette association-là. Avec ça, ils sont plus faciles à défendre. Et cette question, je l’ai discutée également avec le conseiller du Premier ministre qui m’a dit que c’était parfaitement jouable, qu’on pourrait, entre institutions de formation et d’éducation nationale, poser les problèmes et accompagner. Ça aussi, c’est quelque chose qui est sur la bonne voie. Et dans le projet-retour, j’ai intéressé ces jeunes. Je leur ai demandé de faire la première mouture du projet. Donc, ils ont eu deux réunions déjà à mon insu. Et comme je dois y être en septembre-là, je vais encore les revoir pour maintenant reprendre le projet, essayer de le finaliser et le mettre ici au niveau de l’ambassade. Parce que c’est comme ça que nous nous sommes entendus, pour que ça soit en bonne place prévu dans le budget de coopération qui doit être finalisé dans 7 mois, pour 2017.

Parlant toujours de cette amitié, à quoi peut-on s’attendre de l’honorable Sow en termes de perspectives ?

Beaucoup ! Sur le plan culturel, c’est au niveau des deux institutions : le Parlement fédéral belge aura une relation avec le Parlement guinéen où on aura un appui en termes de renforcement des capacités, de formation des élus, d’échanges interparlementaires. Et j’ai aussi demandé des jumelages entre les universités guinéennes et des villes guinéennes avec des villes belges. Ça, c’est une perspective sur laquelle on est en train de travailler. Il y a le projet Retour au pays pour justement décourager les jeunes qui prennent la mer et qui meurent. Donc, il faut décourager ces jeunes. Parce que nous avons besoin des forces vives dans ce pays, parce que si tout le monde part, qui va développer ce pays ? L’agriculture est là. Tu vas dans les villages, en Haute Guinée, en Moyenne Guinée, il n’y a que des vieux et des vieilles. Ça, c’est grave ! Il faut tout faire pour inverser cette tendance, faire en sorte que les jeunes restent. Mais ils ne peuvent pas rester comme ça. Il faut les occuper. Il faut trouver des projets porteurs, les organiser, les former. Donc, tous ces axes-là, nous les avons vus. Et normalement, comme je l’ai dit, je repars en septembre. Je dois avoir une rencontre au niveau du Parlement fédéral pour voir ces axes de coopération. Et pour le financement actuel de 15 millions d’euros disponibles avec la Belgique, j’ai demandé aux partenaires qu’on intéresse la représentation nationale, pour nous permettre de jouer notre rôle de contrôle de l’action gouvernementale. L’argent qui est donné à la Guinée, c’est donné au nom des populations guinéennes. Et nous sommes les représentants du peuple de Guinée. Nous entendons, en tant qu’Assemblée nationale, jouer notre rôle, être impliqués, savoir là où on devait faire les forages, est-ce que les forages sont effectivement là. Est-ce qu’il y a l’eau ou pas. Là où on devait monter une école, est-ce que l’école est là. Est-ce que l’école est fonctionnelle. Est-ce que l’Etat a fait sa part. Donc, c’est ça mon ambition au niveau du groupe de l’amitié Guinée-Belgique. Et les gens sont prêts à accompagner l’Assemblée en tant qu’institution pour nous permettre de jouer pleinement notre rôle.

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