Le général Valentin Haba : « Nous avons compté 54 corps dans les camions au niveau du Camp Samory »

Après le général Ansoumane Camara Baffoé, c’est le directeur général de la police à l’époque des faits, il s’agit du contrôleur général Valentin Haba, âgé de 61 ans qui a comparu ce mardi au tribunal criminel de Dixinn délocalisé à Kaloum au compte de la déposition des témoins.

La loi lui confère le droit d’être entendu à huis-clos s’il le souhaite. Après ce rappel du juge, il a opté pour une audience publique. Il a aussi précisé qu’il n’y a pas de lien de subordination entre lui et qui que ce soit du côté des accusés ou du côté des victimes.

C’est après qu’il a juré de dire la vérité, rien que la vérité dans cette affaire. Il a commencé sa déposition par les conditions dans lesquelles il a été nommé DG de la police nationale à l’arrivée du CNDD au pouvoir.

Dans sa déposition, l’ex directeur général de la police nationale a déclaré avoir été appelé par le général Ansoumane Camara dit Baffoé pour l’informer de la situation qui prévoyait au stade de Conakry ce jour du 28 septembre.

Selon cet officier supérieur de la police nationale, ils ont commencé à voir le premier corps au niveau du stade olympique, avant d’en compter 17 au stade annexe.

« Avant qu’on ne rentre dans la cour du stade, j’ai aperçu du côté de Dixinn en partance vers le pont de Madina, un véhicule de la Croix rouge, ils étaient déjà en dehors de l’immeuble de la commune. Nous sommes donc entrés, directement nous nous sommes dirigés vers la pelouse, jusqu’au bout de la pelouse il n’y avait pas de corps. C’est quand on sortait du côté du stade olympique qu’on a vu le premier corps, en plus un second. Je me suis arrêté, j’ai dit au général Ansoumane « mettez le dispositif de sécurité en place que personne d’autre ne rentre ». Puis on a essayé de faire un tour en dehors de la pelouse, nous sommes allés vers le stade annexe, les gens qui étaient en train de se déployer pour le dispositif de sécurité, c’est certains qui nous ont signalé pour dire « venez ici », le petit portail du stade annexe qui se trouve à côté de la grande porte de l’entrée avait été défoncé, la porte s’est renversée, à cet endroit il y avait 17 corps » a-t-il déclaré.

Poursuivant, le DG de la police, au moment des faits, a déclaré avoir contacté son ministre de tutelle, le feu général Mamadouba Toto Camara pour lui parler de la situation du stade, qui lui a dit d’attendre qu’il leur envoi des véhicules pour le transport des corps.

« Donc j’ai laissé ces gens qui étaient dans le dispositif de sécurité, je me suis retourné du côté de la cour vers le stade olympique. J’ai pris mon téléphone, j’ai appelé le général Toto qui était notre ministre (de la sécurité), heureusement il a répondu, je lui ai dit  » je viens d’arriver au stade, mais la situation n’est pas bonne, il y a des corps  » . Il me dit  » attendez, je vais vous envoyer des véhicules » . Aussitôt dit, je l’ai raccroché et j’ai appelé le directeur central de la police judiciaire, il a répondu, je lui ai dit prends une équipe de la division investigation criminelle, tu les envoies immédiatement au stade, vous viendrez me trouver ici. Je dis n’oubliez pas de passer par la police technique et scientifique (PTS), venez tous ensemble, c’est ce qui a été fait. Ils sont donc venus, je les ai demandés de prendre toutes les dispositions qui s’y sont en la matière. Et entre temps, les véhicules que le général Toto avait promis, deux camions sont venus, c’est en ce moment que les gens ont commencé à ramener les corps. On les mettait ensemble, on était arrêté du côté du portail de sortie vers le stade olympique. Quand tous les corps ont été rassemblés, ils procédé à l’embarquement » dit-il.

Ensuite, le général Haba a exprimé son étonnement de voir que les deux camions qui étaient envoyés par le général Toto ne se dirigent pas à la morgue de l’hôpital Ignace Deen, mais plutôt dans l’enceinte du camp Almamy Samory Touré.

« Après l’embarquement, les véhicules ont pris la sortie, nous on les a suivis, nous sommes donc arrivés à la hauteur du camp Samory, les véhicules rentrés là. » Quand ils sont rentrés, j’ai dit aux hommes de sécuriser et d’attendre que je comprenne pourquoi on est là. Personne ne s’est approché du contenu des véhicules. J’ai appelé le général Toto, je lui ai dit que les véhicules sont venus, les corps ont été pris, je dis que les véhicules sont entrés au camp Samory. Je dis, je souhaiterais que vous soyez là. Il me dit  » J’arrive, attendez-moi là  ». Nous sommes donc restés là, le général Toto est arrivé, mais avant qu’il n’arrive, le premier des autorités à arriver, c’est le ministre de la Santé, le colonel Diaby. « Entre temps, le général Toto est arrivé », a fait entendre le DG de la police nationale.

Selon ce haut cadre de la police, ce n’est qu’à l’arrivée de son ministre que son équipe et lui ont procédé au décompte des corps qui ont été transportés dans ces deux camions de l’armée guinéenne.

« Quand il est arrivé, il m’a demandé, il me dit qu’il y a combien de corps ici ? Je dis, ce n’est pas compté, on attendait votre arrivée. Il dit « comptez », des volontaires sont montés dans les véhicules, le premier décompte, il y a eu incompréhension, certains ont dit 56 d’autres ont dit 54. On a demandé de recompter, ils ont recompté, finalement ils ont dit 54 », a-t-il déclaré.

Ibrahima Sory Soumah