Éruption du Nyiragongo en RDC: «On a eu de la chance d’avoir une coulée de lave qui s’est arrêtée aux portes de Goma»

Le volcan Nyiragongo, près de Goma, dans l’est de la RDC, ne semble plus menaçant. Le volcanologue Benoît Smets revient sur cette éruption qui a pris tout le monde par surprise, même si on savait que ce volcan pourrait entrer en éruption un jour ou l’autre

La coulée de lave s’est arrêtée juste avant d’arriver dans la ville. Samedi soir, son éruption inattendue a jeté les habitants de Goma sur les routes, les populations ont fui hors de la ville et même jusqu’au Rwanda voisin. Des mouvements de panique ont provoqué des accidents, plusieurs morts sont à déplorer, le bilan officiel est en cours de consolidation.

RFI : Y a-t-il eu des signes annonciateurs de l’éruption du Nyiragongo ?

Benoît Smet : Il n’y a pas eu de signes précurseurs qui nous annonçaient qu’il allait y avoir un gros changement au niveau du Nyiragongo. Il faut savoir que ce sont des volcans – tant le Nyiragongo que son voisin, le Nyamuragira – qui montrent des signes précurseurs clairs, comme on le voit dans la sismicité, dans les tremblements de terre, généralement quelques dizaines de minutes ou quelques heures avant l’éruption. Et donc on n’a pas eu vraiment de signes clairs, ce qui nous a pris par surprise. On ne s’y attendait pas du tout.

Et quels sont ces signes qui ne sont pas apparus ?

Par exemple, la caractéristique du Nyiragongo, c’est qu’il a un lac de lave dans son cratère principal et on se serait attendu à avoir des variations extrêmement violentes de ce lac de lave, une activité sismique associée au lac de lave et peut-être des séismes tectoniques, donc des séismes cassants, avec des magnitudes ressenties, qui arriveraient avant l’éruption. Et là, en fait, ce genre de sismicité est plutôt arrivé après. Donc il semblerait qu’il y ait vraiment eu une éruption en surface et puis une activité sismique plus en profondeur, avec un apport en magma, mais cela n’est pas encore confirmé, puisqu’on a juste des résultats automatiques. On n’a pas encore eu d’analyses détaillées des mesures sismiques.

Et de ce que l’on a pu voir, cela aurait pu être pire ?

Déjà, le fait qu’il n’y ait pas eu de gros précurseurs, dit que probablement ce n’est pas non plus une éruption majeure, comme on a eu en janvier 2002. La configuration de la longueur de la coulée de lave. Ce qui s’est passé ressemble plus à ce qu’on a eu en 1977. C’est une éruption qui est un peu moins violente. Je pense qu’on a eu de la chance d’avoir une coulée de lave qui s’est arrêtée aux portes de Goma. Même si elle a malheureusement envahi des zones habitées, elle s’est quand même limitée à la partie nord de la ville et elle n’est pas rentrée vers le centre-ville, où là, les dégâts auraient été beaucoup plus conséquents.

Et pour la suite, à quoi peut-on s’attendre ?

C’est une bonne question, parce qu’on connaît seulement deux éruptions historiques de volcans, en 1977 et 2002. On a maintenant un cas de figure qui semble légèrement différente, donc c’est difficile à interpréter. D’après ce que l’on voit maintenant, je ne pense pas qu’on aurait à nouveau une activité en surface. Par contre, l’activité sismique en profondeur continue. Donc on ne sait pas encore exactement ce qui se passe, il va falloir qu’on analyse en détail cette activité. Mais a priori, je dirais que l’éruption en surface est terminée.

Rfi.fr