Conakry : atmosphère de gueule de bois pour la fête de fin d’année

Habituellement à Conakry, lors des fêtes de fin d’année, les marchés sont pleins à craquer, les routes bourrées de voitures et d’innombrables embouteillages se dessinent dans les plus grandes artères de la capitale guinéenne. Mais malheureusement, depuis cette tragédie du 18 décembre à Kaloum, la ville est dans un total désarroi.

Pour Sow vendeur de produits cosmétiques au marché de Taouyah, certains marchands risquent de ne plus commander de nouvelles marchandises avec cette situation de crise dans le pays.

« Pendant les années précédentes, le marché était mieux que ce qui se passe actuellement. En ce moment, ça marchait bien, mais cette année, malheureusement, il n’y a pas d’achat. Je pense que cela est dû à l’explosion du dépôt, car ceci a impacté beaucoup de choses. En cette fin d’année, nous qui avons l’habitude d’avoir des clients qui se bousculent ici, nous n’en avons aucun. Aussi au niveau du transport il y a eu beaucoup de changements, il y a plein de vendeurs de notre secteur qui disent que si cet arrivage finit, ils ne pourront plus commander d’autres marchandises, car il y a une augmentation et lorsque tu n’écroules pas vite ce que tu as en stock, comment tu peux en recommander ? » S’est-il interrogé.

Si les années précédentes les marchands s’interrogeaient sur le bénéfice de leur vente, pour Moussa Kanté, vendeur de vêtements, la question n’est plus au niveau du bénéfice, maintenant, il faut juste trouver le peu pour subvenir aux charges familiales et faire face aux autres responsabilités.

« Cette année est inexplicable, le pays est complètement au point mort. Avant l’incendie, on espérait au moins que les choses allaient rentrer dans l’ordre parce que c’est en fin d’année que nous faisons beaucoup d’activités, nous les vendeurs d’habits. Cette année, c’est catastrophique, rien ne bouge, depuis le matin, il n’y a pas de clients, le 24 est passé, on n’a rien senti, on n’a même pas senti que c’était Noël, il n’y a pas eu de chiffre d’affaires. Et voilà, nous sommes à quelques jours de la fête de fin d’année et encore rien, donc cela veut dire que c’est une année neutre pour nous. Actuellement, nous avons assez de nouveaux habits, de nouvelles marchandises et d’autres même qui sont en train de sortir du port et les conteneurs qui étaient bloqués depuis la semaine dernière à cause de l’incident du dépôt de carburant. Il y a d’autres conteneurs qui devaient sortir et qui n’étaient pas encore sortis et c’est cette semaine que les choses ont commencée. Non seulement les marchandises sont venues en retard, mais aussi il n’y pas d’argent. Présentement, nous cherchons comment nourrir notre famille, nous ne cherchons pas de bénéfice. » a-t-il expliqué.

Plus loin, Moussa dit qu’il pense à comment faire face aux difficultés auxquelles il est confronté, selon lui la plupart des vendeurs d’habits sont des  »endettés ».

« Moi qui suis là, je pense à comment relancer mes activités dans l’année à venir et comment faire face aux charges, aux créanciers. La plupart des commerçants exercent avec des dettes même s’ils ne le disent pas verbalement, par exemple dans une boutique pleine ou un magasin plein, tout ne lui appartient pas. Les commerçants travaillent à base de confiance alors quand ce ne marche pas, cela crée beaucoup de dégâts. Nous pensons à nos charges, le loyer, les impôts qui sont extrêmement élevés avec une année comme celle-ci. Le gouvernement nous fatigue, avec une petite boutique, on te demande de payer 6 millions alors que même le loyer de ta boutique ne vaut pas ce prix. Nous demandons à l’État de faire le rabais des taxes en matière de commerce ainsi que des taxes douanières afin que nous puissions nous positionner pour l’année prochaine parce que celle-ci est déjà perdue. » A déploré monsieur Kanté.

Fatoumata, vendeuse de jouets et vêtements pour enfants, voit cette fin d’année très différente des autres, pour elle la transportation des marchandises devient très difficile depuis l’incendie et avec l’augmentation des prix, les clients n’arrivent plus à acheter.

« Nous n’avons pas eu de clients cette année comme les années précédentes. Depuis l’explosion du dépôt de carburant, la transportation de nos jouets et vêtements a doublé de prix et cela joue énormément sur notre vente », explique-t-elle.

Pour Austin, vendeur de vêtements, plus les années avancent, plus les choses deviennent plus chères. Les choses ont doublé de prix depuis cette tragédie à Kaloum.

« En 2018, quand je suis venu nouvellement ici, lors des fins d’année, il y avait d’énormes achats, on faisait parfois des recettes de 10 millions, 15 millions et 20 millions alors que cette année, il n’y a rien, nous avons de nouvelles marchandises, mais malheureusement, nous n’avons pas d’acheteurs alors que c’est la fin d’année. » a souligné ce ressortissant nigérian.

Cette fin d’année n’est semblable à aucune des années dernières, depuis cette tragédie à Kaloum, la population guinéenne n’arrive pas à se situer.

Madinatou Diallo pour Conakry Infos