La récente tournée en Guinée forestière du général Amara Camara, secrétaire général de la présidence de la République, a ouvert un nouveau chapitre dans le discours politique en Guinée.
Lors de ses interventions, il a déclaré que le pays n’était plus en Transition, mais en Refondation, suscitant une levée de boucliers dans l’opposition.
Le président du parti MoDeL, Aliou Bah, a vivement dénoncé ce mercredi cette requalification qu’il considère comme une manœuvre destinée à détourner l’attention des véritables enjeux.
Sur sa page Facebook, Aliou Bah a fustigé la démarche de la junte militaire du CNRD (Comité National du Rassemblement pour le Développement), l’accusant de manipulations et d’une volonté manifeste de s’accrocher au pouvoir.
« Parler de ‘Refondation’ au lieu de Transition est une tentative de faire croire qu’ils ne se sentent plus liés par leurs engagements », a-t-il affirmé.
« Refondation » : une diversion ou un tournant ?
L’opposition politique perçoit ce changement de terminologie comme un moyen pour la junte de justifier l’allongement de la Transition et de se libérer des obligations initiales promises à la communauté internationale.
Pour Aliou Bah, ce glissement sémantique traduit une stratégie de manipulation, appuyée par la rhétorique et des slogans.
L’usage systématique du titre de “Président de la République” pour désigner le chef de la junte est également décrié. Selon Aliou Bah, cette appellation imposée aux fonctionnaires ne confère pas à Mamadi Doumbouya une légitimité populaire.
« S’auto-investir d’une mission dite du peuple sans être le choix des citoyens est une forme de mythomanie », a-t-il lancé, qualifiant la situation d’illusion créée pour convaincre un cercle restreint de fidèles.
Une répétition de l’histoire guinéenne ?
Dans un parallèle historique, Aliou Bah a rappelé les erreurs du passé, notamment le cas de l’ancien président Alpha Condé, qui s’était vu conforté dans son projet de troisième mandat avant d’être renversé par ceux qui l’avaient encouragé.
« Ceux qui veulent remplacer les dirigeants sont toujours les premiers à les pousser à commettre l’erreur fatale », a-t-il averti, estimant que le danger pour la junte viendrait de son propre entourage.
Une Transition en péril
Le discours d’Aliou Bah reflète les inquiétudes croissantes face à l’incertitude politique en Guinée. Tandis que les autorités martèlent leur ambition de refonder l’État, l’opposition et une partie de la société civile dénoncent une absence de vision claire pour aboutir à un retour à l’ordre constitutionnel.
Si la Guinée est, comme le dit Aliou Bah, une “malheureuse répétition de l’histoire”, les promesses de Refondation risquent de se heurter aux mêmes écueils qui ont marqué les transitions précédentes.
Dans ce climat tendu, chaque mot et chaque geste de la junte seront scrutés, car la confiance de la population reste à reconquérir.
Mohamed Sylla
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